Supposons que je réalise une étude clinique randomisée en double aveugle où tous les patients sont suivis pendant la durée totale de l’essai. Donc une étude parfaite.
Mon critère principal est basé sur un pourcentage de survenue d’un événement. J’ai deux possibilités :
- Je veux obtenir une différence significative
- Je ne veux pas obtenir une différence significative
Je regarde alors le tableau ci-dessus. Tous les calculs sont réalisés avec 100 patients dans chaque groupe.
Dans la partie bleue, j’ai fait varier les pourcentages obtenus dans les deux groupes en ajoutant un pourcentage fixe de chaque côté : +5%. La différence entre les deux pourcentages est donc constante ; par définition, le nombre de patients à traiter pour éviter un événement aussi.
Dans la partie rose, j’ai fait varier les pourcentages obtenus dans les deux groupes en les multipliant par une valeur fixe de chaque côté : x1.5. Le pourcentage de variation reste donc constant mais la différence entre les deux pourcentages augmente.
En regardant les colonnes « α », je m’aperçois que la significativité statistique est obtenue pour les petites valeurs de P1 et P2 par rapport à celles obtenues par addition d’une constante. Par contre, si je peux affecter mes pourcentages P1 et P2 d’un facteur multiplicatif, alors plus ce facteur est important, plus j’ai de chance d’obtenir une significativité. Cela revient à additionner des pourcentages avec le même rapport.
Si je souhaite obtenir une significativité, j’ai donc 2 possibilités :
- Augmenter mes pourcentages selon un facteur multiplicatif
- Diminuer mes pourcentages selon un facteur additif
Je ferai l’inverse si je ne souhaite pas obtenir de significativité (par exemple lors de l’évaluation de la tolérance d’un produit lors d’une enquête épidémiologique)
Pour modifier les pourcentages, je peux disposer des éléments suivants :
- Les critères de sélection des patients
- Le critère d’évaluation
- La durée de suivi
Ensuite pour évaluer l’évolution d’un critère d’efficacité en fonction de la durée de suivi ou des types de patients, il faut analyser les études épidémiologiques et les données brutes des études déjà réalisées dans le domaine.
Un des systèmes les plus simple est le critère combiné.
Par exemple : décès de cause vasculaire + infarctus du myocarde + AVC.
Si mon produit a un petit effet sur chaque élément de mon critère combiné, je me retrouve dans la situation rose du tableau.
Voici un exemple de critère combiné sur le tableau 2 de N Engl J Med 2001;345:494-502. Le critère principal est la somme d’événements graves (décès de cause vasculaire + infarctus du myocarde + AVC) mais l’effet le plus notable semble être sur ce qui n’est pas un décès ou un AVC.
J’ai repris le tableau 2 ci dessous et ai fait un chi2 pour chaque ligne. La significativité est au dessus de 3.84 (1.960 au carré). Certains nombres sont probablement un peu faux car les données disponibles ne permettent pas de savoir si certains patients ont eu deux événements (on peut avoir la vérole et un bar-tabac comme le dit l’adage bien connu) ou si la base est identique.
VERUM |
PLACEBO |
||
6259 |
6303 |
Chi2 |
|
First primary outcome (FPO) |
582 |
719 |
15.04 |
Second primary outcome |
1035 |
1187 |
11.37 |
Décès CV |
318 |
345 |
0.97 |
Infarctus du myocarde |
324 |
419 |
12.21 |
IdM avec Q |
116 |
193 |
19.12 |
IdM sans Q |
216 |
242 |
1.35 |
STROKE |
75 |
87 |
0.82 |
Refractory Ischemia |
544 |
587 |
1.48 |
Hospitalisation |
85 |
126 |
7.81 |
après hospitalisation |
459 |
461 |
0.00 |
Décès non CV |
41 |
45 |
0.16 |
FPO+Décès non CV |
623 |
764 |
15.02 |
Décès totaux |
359 |
390 |
1.14 |
FPO-Décès CV – Stroke |
189 |
287 |
20.26 |
Décès CV + stroke |
393 |
432 |
1.69 |
Les informations disponibles sur la figure 4 de ce même article sont potentiellement d’une aide précieuse pour définir les critères d’inclusions dans les futurs essais. Dommage que ces informations ne soient disponibles que pour le critère combiné. Elles permettent de cibler des patients pour lesquels l’efficacité semble meilleure donc réduire le coût de l’essai ou favoriser l’obtention d’une différence ou pas.
En conclusion, méfiez vous des critères combinés. Surtout qu’ils peuvent se cacher partout. Si je vous parle des effets indésirables par système (gastro-intestinaux, neurologiques…) ne suis-je pas en train de vous parler d’un critère combiné ?