Genmab vient d’annoncer des résultats positifs pour l’Ofatumumab dans la sclérose en plaques évoluant par poussées. C’est une phase II sur 232 patients suivis pendant 48 semaines et répartis dans 5 groupes dont 1 groupe placebo. Les résultats présentés ici portent sur les 24 premières semaines de l’essai.
Je passe sur l’efficacité évaluée sur des critères IRM.
Les auteurs du communiqué de presse mentionnent qu’aucune leuco encéphalopathie multifocale progressive (LEMP) n’a été observée.
C’est effectivement un effet très très indésirable des immunosuppresseurs (fatal ou laissant des séquelles importantes).
Dans le cadre de la sclérose en plaques, le risque de LEMP a surtout été observé avec le Natalizumab. La fréquence de survenue varie selon de multiples facteurs (présence d’anticorps anti-JCV, durée du traitement-en particulier >2ans-, antécédent de traitements par immuno-modulateurs). Elle varie de 1/10000 à environ 1% selon la combinaison de ces facteurs favorisants.
Mais que conclure de l’absence d’observation d’un tel effet indésirable avec environ 200 patients traités par Ofatumumab et suivis pendant 24 semaines (certains étaient traités avec de très faibles doses) ?
Deux lois de probabilité, la loi Binomiale et la loi de Poisson, relient
- le nombre de tentatives (n),
- la probabilité de survenue d’un succès pour une tentative unique (p),
- le nombre total de succès (k)
- et la probabilité d’observer ce nombre de succès k en réitérant n fois la tentative.
La loi de Poisson est une approximation de la loi Binomiale quand n est grand et p petit. Son calcul est plus facile quand n est grand ; du moins, il l’était au 19ème siècle. (Pour un résumé sur ces deux lois, c’est là )
Ce qui nous intéresse ici est le risque de survenue de la LEMP sous traitement.
Le fait de ne pas en avoir observé avec 200 patients traités donne t-il une information rassurante sur le risque de LEMP.
Grâce à l’une ou l’autre des deux lois, on peut définir pour un risque de LEMP donné, la probabilité de n’obtenir aucun cas de LEMP lors du suivi de 200 patients. Les résultats sont indiqués sur le graphe ci-dessous utilisant la loi binomiale.
Ainsi par exemple si le risque de LEMP avec l’Ofatumumab est de 1/200, la probabilité de ne pas observer de LEMP sur les 200 patients de l’essai est de 37%. Pour que cette probabilité ne soit que de 5%, il faut que le risque de survenue de la LEMP soit environ de 1/66.
Donc, sur ce petit essai sur environ 200 patients traités, ne pas avoir observé de LEMP n’est pas particulièrement rassurant. On ne peut rien dire du risque de LEMP avec ce produit ; elle pourrait être 100 fois supérieure à celle du Natalizumab !
Plus généralement, on n’a que 5% de chance de ne pas observer un effet indésirable sur X patient, si son risque de survenue est de 3/X.
Même pour des produits dont le développement inclut plus de patients, il n’est donc pas rare de ne pas observer un effet indésirable particulier qui ne sera révélé qu’après la mise sur le marché. Ce d’autant que les événements indésirables rares peuvent souvent dépendre de la durée de traitement.