Le dossier de l’Alemtuzumab dans la sclérose en plaques vient d’être rejeté par la FDA.
Tous les documents de la FDA sont au bout de ce lien.
L’analyse de la FDA est résumée sur ces diapositives.
Les reproches concernent principalement le caractère « contrôlé » de l’essai. Trois critères sont analysés (dia 21/149) : La randomisation et la comparabilité des groupes, l’aveugle, les méthodes et procédures d’évaluation.
Les principaux reproches sont les suivants :
- L’analyse ne porte que sur les patients ayant reçu le traitement :
- Certes, ce n’est pas une analyse en intention de traiter, mais quand on valide une analyse excluant les mauvais répondeurs à Avonex et les bons répondeurs au placebo….
- Le médecin traitant et le patient n’était pas en aveugle :
- Oui, comme pour les autres essais dès qu’un événement indésirable un peu spécifique survient : flushing pour Tecfidera, syndrome pseudo-grippal pour Avonex ; Les produits utilisés dans la SEP ont des effets indésirables qui permettent souvent de lever l’aveugle pour le patient et pour le médecin traitant dans les essais contre placebo. Parler d’étude en double-aveugle est souvent illusoire.
- De plus, si l’efficacité apparente chez les patients ressentant cet effet indésirable spécifique est meilleure que chez ceux ne le ressentant, la FDA ne considère pas que cela doit faire douter de l’ampleur du bénéfice observé ou de la conservation de l’aveugle…. (cf Tecfidera).
- Le médecin traitant pouvait évaluer la possibilité de survenue d’une poussée avant l’évaluation de l’EDSS par le médecin évaluateur
- Oui, pour l’essai Tecfidera, le médecin traitant envoyait le patient pour validation des poussées après que le patient a été vu par le médecin évaluateur.
- Les sorties d’essais sont plus nombreuses dans le groupe interféron, en particulier avant le début du traitement.
- Oui, mais avec c’est toujours mieux que les 43% de perdus de vue de l’étude Avonex.
- L’EDSS de référence pour la progression du handicap est celui évalué après la randomisation. Donc, alors que le patient a connaissance de son groupe d’attribution.
- Ça, ce n’est pas normal, surtout car les résultats sont plus favorables que ceux obtenus si l’EDSS de référence utilisé est celui évalué avant la randomisation.
- Les résultats des études sont divergents :
- Les deux études Tecfidera contre placebo montraient aussi des résultats divergents sur la progression du handicap (une étude positive et une négative). La FDA a conclu que Tecfidera ralentissait la progression sur une analyse combinée des deux études. Pourquoi ne pas faire la même chose avec les deux études Alemtuzumab ?
Cette petite liste n’a pas pour objectif de défendre Alemtuzumab. Les études ne sont indemnes de reproches et la tolérance est assez moyenne.
Mais il est amusant de voir à l’œuvre la puissance critique de la FDA appliquée avec autant de sélectivité, vis-à-vis d’un concurrent potentiel de Tysabri.
Sanofi ne pourra malheureusement pas dire à la FDA que puisqu’ils ont validé les études Avonex et Tecfidera, ils peuvent sans se renier valider la leur !
On retiendra que Genzyme a eu le courage de comparer l’Alemtuzumab au Rebif 44 µg.
La comparaison à des produits de référence est rare ; ni Avonex, ni Tecfidera, ni Tysabri n’ont été comparés à des produits de référence dans des études en double-aveugle des dossiers d’AMM qui satisferaient aux critères utilisés par la FDA pour analyser les études Alemtuzumab.
Les critiques de la FDA vont possiblement pousser les laboratoires à faire uniquement des études contre placebo, dans des pays sans couverture sociale pour pouvoir facilement inciter les patients à rester dans l’étude suffisamment longtemps (en particulier ceux inclus dans le groupe placebo).
Lors de l’analyse du dossier de Rebif, la FDA avait analysé les sorties d’essais pour vérifier que les patients ayant quitté l’essai ne favorisaient pas le bénéfice observé. Il aurait été souhaitable que cette analyse soit aussi réalisée pour l’essai Avonex.
Heureusement que nous avons l’EMA pour juger de la validité des études des médicaments….